« Je t'aime, je reviendrai c'est sûr ! En Grèce, en Suède, aux US, on s'en fout tant qu'on est ensemble non ? » La dernière fois qu’elle avait vu Zac, tout était beau. Son avenir était tellement sûre dans la petite tête brune de Lena. Zac et elle ne pouvaient pas être séparés. Jamais. Elle l’aimait tellement fort et elle était certaine que ça suffirait. N’est-ce pas la chose la plus forte au monde ? L’amour de deux adolescents ? Mais surtout, à cet âge-là, on est naïfs. Des milliers de kilomètres les séparaient et la distance avait eu raison de leur couple. Les appels se faisaient de plus en plus rares, mais la jeune adolescente continuait à s’accrocher. Elle voulait y croire. Et puis, elle tombait sur son répondeur, souvent, et quand il décrochait le téléphone, elle le sentait loin. Pas en kilomètres, non, mais loin d’elle, loin du Zac qui aurait décroché la lune pour elle. Au bout d’un certain temps, ils n’avaient plus rien à se dire, et là, elle le sentait. Il l’avait remplacé, c’était la seule raison plausible. Alors, le cœur lourd et en miettes, elle se fit une raison. Il fallait qu’elle cesse de l’appeler, ça faisait encore plus mal de n’avoir aucune réponse. Zac était son premier amour, et quelque part, elle n’aimerait personne d’autre aussi fort, elle le savait, quelque part une petite voix le lui faisait remarquer. Tous les jours. Même depuis qu’elle avait épousé Leo.

« Consens-tu à prendre cet homme pour époux légitime, à vivre avec lui selon la loi de Dieu, dans le saint état du mariage? L'aimeras-tu, le consoleras-tu, l'honoreras-tu, le garderas-tu, dans la maladie comme dans la santé, et, renonçant à toute autre union, lui resteras-tu fidèle jusqu'à la mort? » Elle ne pouvait plus reculer. Et elle n’en avait pas même envie. C’est à ce moment précis que Lena unit le reste de sa vie à Leonidas Ioannis, jeune homme qu’elle avait rencontré trois ans plus tôt par le biais de sa grand-mère. Au départ, elle n’était pas tellement pour. De fréquenter un autre que Zac, elle était toujours persuadée qu’un jour, il reviendrait. Tous les étés, elle espérait qu’il lui ferait la surprise, qu’elle le trouverait en bas de chez elle et que tout redeviendrait comme avant. Mais la vie avait bel et bien eu raison de leur idylle d’adolescent et il ne reviendrait pas. Alors, avec le temps, elle avait appris à connaître Leo et elle en était tombée amoureuse. Il était gentille, protecteur, beau et il l’aimait. C’était l’essentiel. Mariée à vingt ans, elle apprit donc à gérer la vie à deux, à faire des concessions. Mais s’il y avait une chose sur laquelle elle ne plierait jamais, c’était son voyage aux Etats-Unis. Elle avait toujours rêvé de poursuivre ses études là-bas, et s’il ne voulait pas la suivre, le choix serait vite fait. Il avait sa vie en Grèce, sa famille, un métier stable –ce qui n’est pas donné à tout le monde à cet âge-là- il n’avait donc pas l’opportunité de venir avec elle. Tant pis, l’amour à distance, elle connaît, elle se fichait de prendre le risque de tout gâcher. Déterminée à vivre son rêve américain, elle allait donc mettre son mariage en péril. Et puis, c’était aussi une manière de se rapprocher de Zac. Pourtant, il la rejoindrait deux ans plus tard, et cette preuve d'amour que Zac ne lui avait pas donné renforça le couple que formait Leonidas et Lena.

Deux barres. Deux petits traits insignifiants en somme, qui pourtant, vont déterminer les prochaines années de la vie de Lena. Et merde. Le test est bel et bien positif, Lena va avoir un enfant. Oui, mais avec qui ? Ces derniers temps, sa vie de jeune femme mariée bien rangée était quelque peu partie en vrille. Délaissant son mari au profit de son travail, elle s’occupait plus des mariages et des divorces des autres couples, plutôt que du sien, qui battait clairement de l’aile. Et en plus de s’être plongée entièrement dans son travail, elle s’était récemment donné deux fois plus de boulot en recherchant activement Zac. Elle n’arrivait pas à le sortir de sa tête. Elle avait eu besoin de le revoir, pour pouvoir tourner la page et se donner complètement à Leo. Mauvaise idée, puisqu’elle était complètement retombée dans ses bras. De fil en aiguille, ils avaient passé la nuit ensemble, sur ce bateau, domicile de Zac. Et le lendemain, elle était rentrée chez elle, l’air de rien, emplie d’une culpabilité qui la rongeait depuis presque deux mois maintenant. « Putain. » Elle jeta un regard en l’air, à la fois pour empêcher les larmes qui menaçaient de couler sur son visage de tomber, mais aussi, comme pour demander au bon dieu ce qu’elle avait bien pu faire pour mériter une telle situation –mis à part tromper son mari. Elle sortit des toilettes de l’établissement dans lequel elle travaillait, qui se trouvait vide à cette heure tardive, et elle jeta furieuse le petit bâtonnet dans une poubelle. Une fois rentrée, elle ne devait pas être la jeune femme la plus resplendissante de San Francisco. « Bonsoir chérie. Tu as passé une bonne journée ? » Sans même répondre à l’homme avec lequel elle partageait sa vie, elle monta dans leur chambre, pour se débarrasser de cette robe qui la compressait. Maintenant qu’elle connaissait la nouvelle, elle avait l’impression d’être énorme. Son mari la suivit dans la chambre, sûrement intrigué de l’accueil qu’elle lui avait réservé. « Ça ne va pas ? » Dos à lui, elle se frottait le visage, dans le reflet du miroir, elle se trouvait blême, les yeux rougis et le visage triste. Elle prit place sur le lit, toujours silencieuse, le regard plongé sur la moquette. « Qu’est-ce qu’il se passe Lena ? Tu me fais peur là. » Elle leva son regard grave pour le plonger dans ceux de l’homme qu’elle avait trahi. « Je suis enceinte. » Elle devait le lui dire, il le saurait un jour, de toute façon. Leo lui attrapa le visage et son regard s’illumina, chose qui fit encore plus culpabiliser Lena. « Mais c’est merveilleux. » Elle se força à sourire et répondit dans un souffle : « Oui.. » C’est tellement beau d’être enceinte. Sauf quand on ne sait pas qui est le père.