Elle tapote du pied, Echo, quand elle est nerveuse. C'est le seul geste qui la trahit. Son visage reste impassible. Ses bras croisés sur la poitrine, son regard dédaigneux, dissuadent toutes les personnes pathétiques qui l'entourent de lui adresser un mot. Thérapie de groupe. Termes politiquement correct pour éviter la vérité : regroupement de fous. « J'ai perdu mon fils et j'ai un peu perdu pieds. » Le bruit autour d'elle s'estompe, elle n'entend plus que les battements de son cœur qui fait des soubresauts. « Il était beau mon fils, un véritable playboy avec les filles. » Non Echo, la laisse pas gagner. Enfuis les souvenirs là où ils appartiennent. Ne les laisse pas remonter à la surface. Elle se relève, Echo, brutalement. Sa chaise tombe sur le sol, mais elle s'en moque du bruit. Elle se moque des regards qui se posent sur elle. Elle se moque de l'air peiné sur le visage de sa mère. Il n'était pas seulement beau, Isaiah, c'était son héros à Echo. Mais lui aussi, lui a tourné le dos. Comme tous les autres. Comme son père. Comme sa mère. Comme toutes les personnes qui étaient censées la protéger. La porte claque derrière elle, l'air frais qui balaie ses longs cheveux blonds n'apaise en rien les tumultes de ses émotions. Reprends toi, Echo. Ne deviens pas comme elle. Sa main glisse sur son avant bras, elle dessine la cicatrice qui s'y trouve, comme pour se souvenir de ce qu'elle pourrait devenir. « Echo ! » Elle se tourne brutalement. Son regard s'accroche aux prunelles azurs de sa mère. Elle se voit dans ses traits. Tout le monde voit en Echo, le portrait de sa mère, la folie en moins. Faut espérer. « Bébé, laisse-moi rentrer à la maison avec toi. » Elle secoue la tête, Echo. Elle veut pas, Echo, retourner à cette vie où elle doit s'inquiéter, sans cesse, de savoir sa mère en sécurité. « Je me soigne maintenant. » Un rire froid lui échappe, c'est plus fort qu'elle. « Regarde ça maman ! Regarde ! » qu'elle hurle, lui mettant son bras sous les yeux. « C'était un accident. » qu'elle dit, évitant la cicatrice qu'elle a placé sur le corps de sa fille. Mais Echo, elle sait. Elle sait que ce n'était pas un accident, qu'elle voulait sa mort ce soir là, qu'elle voulait rejoindre son fils et emporté sa fille avec elle. Elle gratte sa cicatrice, se souvient de la douleur quand sa mère a enfoncé la larme dans ses veines. « J'ai déjà entendu tous tes discours. Je les connais par cœur. Tout comme je sais, ce qui se passera quand t'arrêteras les médicaments parce qu'il bride ta créativité. » Alors, elle lui tourne le dos, Echo, retrouve sa vielle voiture et ses deux boulots pour payer l'asile de maman. Pardon, la maison de repos.

Elle fume, Echo. Petit répit dans une journée trop chargée. Elle fume, mais le plaisir ne vient pas. Pas ce soir. Ses pensées s'entrechoquent, ne lui laissent aucun répit. La porte de l'arrière salle claque. Elle croise son regard. Putain. « J'suis pas d'humeur ce soir. » qu'elle répond impassible, brulant sa cigarette entre ses lèvres. Elle connait son effet, elle sait qu'il met sa tête à l'envers. Et putain, ça lui fout un peur bleue à Echo. Ce soir, plus qu'un autre soir. « Quand est-ce que tu l'es ? » Elle hausse les épaules. Elle pourrait lui dire qu'elle est d'humeur égal habituellement, mais que depuis qu'elle le connaît, y a tout qui prend l'eau. « Tu veux en parler ?» « T'es psy maintenant ? » Il se rapproche. Ses mains encadrent son visage. Leurs regards s'accrochent. Leurs cœurs s'emballent. Elle y croit presque, Echo, au baiser qu'il lui promet quand son regard descend vers ses lèvres. Mais ses lèvres, il les dépose sur son front. Trop longtemps pour que ce soit anodin. Trop haut pour que ça compte. « Tu me rends dingue.» Et leurs lèvres se trouvent. Enfin. La délivrance. L'apothéose. Ses doigts s'accrochent à son tshirt, son corps se presse contre le sien. Elle perd le souffle, Echo. La raison aussi. Ils s'embrassent, ils s'embrasent, et Echo, elle va finir par brûler.